lundi 26 novembre 2012

Point de fuite



Pour M., alias Pretty dark curls,  qui pense que l'on fait forcément du vélo cheveux au vent  (et pour ne pas la détromper) ce joli extrait du film Butch Cassidy and the sundance kid,  western de George Roy  Hill ( 1969).
Mais, pour rétablir la vérité sur ma façon de faire du  vélo et entretenir la légende (sachons être modeste), un texte :

"Le chevalier errant"



Gros vent en bourrasques et de face. Pour les jambes, ça semble aller, c’est plutôt un état général de fatigue et un rhume persistant qui laissent penser que la sortie ne sera pas qu’une partie de plaisir.  Il fait doux, les reliefs de Sainte Victoire sont  impressionnants, les arêtes de calcaire  très proches quand on attaque le col de Saint Antonin et plus encore quand on sort des lacets, la barre des falaises se dresse sur la gauche, riches nuances de gris, le soleil n’éclaire pas la roche.
 Ce matin, je peine bien plus qu’un autre jour.
 Le vent du sud charge le ciel et coiffe de nuages éméchés le dos étiré de la montagne vers son extrémité est, au-delà de Pourrières.  Un cycliste du club de Septèmes, échappé d’un groupe que j’avais dépassé peu avant,  me rejoint et me dit de prendre sa roue  ce que je fais avec beaucoup d’application, à la fois contente qu’il me donne le rythme et consciente qu’il m’oblige à puiser des forces là où ça fait mal, surtout aujourd’hui.
A l’arrivée au col de Saint Antonin, il me distance des quelques mètres que je n’ai pas eu le courage de disputer jusqu’au bout. Je le laisse attendre ses compagnons de route et file, à nouveau solitaire, vers  Pourrières.  La route trace parmi les vignes rouges, je  pense aux Récits de la demi-brigade  de Giono quand j’aperçois  le panneau bleu qui pointe sur la droite, « Saint-Pons »,  écrit en lettres blanches. « Saint-Pons », c’est, dans le recueil de nouvelles, le lieu de la Capitainerie du gendarme Martial Langlois. Des nouvelles dont je m’étais délectée il y a quelques années et qui, immanquablement me reviennent en mémoire à cet endroit précis.  Souvent, quand, arrivée à Pourrières,  au lieu de bifurquer vers Trets, je prends à gauche vers le col de Rians, je sais que Giono a mis ses pas sur ces terres et s’en est imprégné pour évoquer les longues courses à cheval de Langlois, de nuit ou de jour.  Je reconnais, dans le passage étroit pris entre les roches abruptes, les coins qui favorisent les embuscades et, montée sur mon vélo, j’accompagne en pensées Langlois dans une course nocturne hasardeuse pour rejoindre une ferme solitaire où il espère obtenir quelque information.
A Trets, j’amorce le retour, vent de dos, sur la piste cyclable, c’est royal, facile. Je profite à plein de l’impression d’être plus en forme qu’au début de la sortie, j’appuie sur les pédales pour rouler le plus vite possible.  Un cycliste me rejoint, je l’avais aperçu sur le côté de la piste, en train de se restaurer.  Je prends sa roue, je me rends vite à l’évidence qu’il a dû se fatiguer pour me rattraper et qu’il ne parvient pas à garder le rythme dans le faux-plat montant qui rejoint Châteauneuf-le-Rouge, je le dépasse à mon tour. Il rentre par la nationale, je coupe en face par le chemin dit  « ancien chemin de Beaurecueil à Saint Savournin ». Au loin, une forme. Je l’observe, s’éloigne-t-elle ou vient-elle à ma rencontre ?  Il s’agit probablement d’un jogger et non d’un cycliste: le point qui vient à ma rencontre  tressaute légèrement, au rythme des foulées, c’est une femme qui me croise et me salue sportivement.  Une centaine de mètres plus loin, après la bascule du petit col, une autre forme se dessine au loin, je m’amuse de la répétition. J’observe à nouveau, ce qui me distrait de mon propre effort. Cette fois, il me semble que la forme est bien plus allongée, elle ne se déplace pas  en sautillant : il s’agit d’une cavalière, seule sur la route. Elle a dû, comme moi, s’interroger un instant sur la difficulté potentielle que je représentais pour elle et son cheval.  C’est-elle sentie en danger ?  Elle est pour moi l’aventure d’un instant et je suis pour elle, également, une poignée de secondes, son aventure  de  chevalier errant partie seule, sans compagnon, pour l’inconnu. Le vent  m'aère la tête d'une oreille à l'autre déposant au passage cette idée qui fait sourire.  Ne suis-je pas aussi, sur ma bête cadre-aluminium-fourche-carbone,  ma selle italienne, coiffée de mon casque profilé, une espèce de chevalier en quête de ce qu’il ne peut trouver,  ma quête a duré longtemps, elle est restée vaine, mais je vais …  cherchant l’illusoire aventure,  mettre à l’épreuve ma vaillance et mon audace*, dérisoires. Toute sortie à vélo est une potentielle aventure, au point qu'il m'arrive d'avoir du mal à trouver le sommeil avant une "grosse sortie". La fatigue qui me raccompagne me fait du bien.

f.l.

 * Chrétien de Troyes, Yvain ou le Chevalier au Lion.


dimanche 25 novembre 2012

Exposition hommage au galeriste André Nègre par Alain Paire

Le vernissage du 5 décembre marquera l'ouverture d'une exposition à l'occasion de laquelle Alain Paire ouvrira sa galerie aux oeuvres collectionnées par le galeriste André Nègre.  
Un article à lire sur le site de la galerie Alain Paire,  sur Pascal Verbena et cette prochaine exposition:  ICI

Et un autre article de 2007 lors d'une précédente exposition consacrée à André Nègre : LA

jeudi 22 novembre 2012

"Premier hiver", Kamel Khélif

Kamel Khélif dédicacera son livre Premier hiver samedi 24 novembre, de 15h à 19h à la librairie "la Touriale", 211 boulevard de la Libération à Marseille. Il signera, autour d'un verre, ce livre pour les petits et les grands.  Parlez-en  autour de vous.

"Ils avaient été chassés par la misère de la guerre qui avait eu lieu là-bas, il n'y avait pas si longtemps, et le désir violent de traverser la mer pour trouver ailleurs une vie meilleure..."  Kamel Khélif raconte le premier hiver d'une famille qui rejoint le père installé en France, dans les années qui suivent la fin de la guerre d'Algérie. 

Premier Hiver, Kamel Khélif, éditions Grandir, 2012  - 17€

mercredi 21 novembre 2012

Tout est fin prêt, ce soir, vernissage de l'exposition "Traits...intimes", au musée Arteum

Ce soir le musée Arteum de Châteauneuf-le-Rouge ouvre ses portes sur une exposition de dessins: "Traits...intimes". Vernissage à partir de 18h.  Exposition du 21 novembre au 22 décembre.
Denise et Pedro Fernandez-Grundman en discussion avec Alain Puech
Un ami installe un grand dessin de Louise Lefort
Alain Puech accroche ses autoportraits
Pierre Salvan
Installation en cours pour le travail de Delphine Poitevin
Les dessins de Catherine Duchêne sortent des cartons
Catherine Duchêne et une amie en pleine action


L'équipe d'Arteum, Cécile, Christiane Courbon et Pierre Vallauri, devant les dessins de Georges Rinaudo.
On vous attend tout à l'heure !

dimanche 18 novembre 2012

La vie au bout des doigts ,Patrick Edlinger

"Ce qui est important en escalade, c'est la façon dont tu passes, le but n'est pas de passer crispé sur des prises. L'intérêt c'est d'être le plus esthétique et le plus harmonieux possible. C'est une expression corporelle au même titre que la danse, une chorégraphie dictée par les prises, un opéra vertical"
Patrick Edlinger.

lundi 12 novembre 2012

Vernissage de l'exposition "Traits...intimes", musée Arteum, Châteauneuf-le-Rouge

J'ai le plaisir d'annoncer le vernissage de l'exposition "Traits...Intimes", le 21 novembre à 18h30  au musée Arteum à Châteauneuf-le-Rouge. 
Pierre Vallauri m'a demandé il y a quelques mois, de m'associer au projet de cette exposition dédiée au dessin.
J'ai, à cette occasion, rencontré avec lui les artistes invités et nous avons rédigé  des articles individuels publiés dans ce blog et celui de Pierre Vallauri (en quête d'images), que l'on pourra retrouver en cliquant sur les liens proposés ci-dessous. 
Lors de la visite de l'exposition qui s'étendra du 21 novembre au 22 décembre, on pourra aussi se procurer le catalogue de l'exposition.












samedi 10 novembre 2012

PABLO 2. Apollinaire, Julie Birmant & Clément Oubrerie




PABLO  2. Apollinaire, chez Dargaud éditeur, album BD de Julie Birmant (scénario) et  Clément Oubrerie (dessins)                             
Deuxième album de la série PABLO,  paru  en septembre,  racontant du point de vue de Fernande Olivier, modèle et muse de nombreux artistes parisiens du début du XXème siècle,  sa rencontre avec Picasso (elle fut sa première compagne) et  Max Jacob  (T.1), Guillaume Apollinaire et plus tard, Léo et Gertrude Stein (T. 2).  Le bateau-lavoir (ainsi nommé par Max Jacob), le Lapin Agile, et les diverses adresses des artistes constituent les  décors du récit.  J’admire les dessins, choix d’une ligne claire pour une bonne lisibilité mais travail des couleurs tout en demi-teintes et ombres, pour donner  de la matière,  une pâte  chaleureuse à l’ensemble. Fernande est un des modèles les plus appréciés des peintres et des sculpteurs parisiens du début du siècle. Ayant fui la province, sa famille et un mari brutal auquel elle a été mariée de force, elle arrive à Paris et rencontre le sculpteur Laurent Debienne qui devient son bienfaiteur et son amant et l’initie au métier de modèle (T. 1). 
Ce deuxième tome, titré « Apollinaire », annonce la rencontre entre Pablo Picasso et Guillaume Apollinaire qui se fait en 1904. Un soir, Pablo conduit par le faux baron Mollet découvre un poète qui harangue la foule dans une taverne anglaise  du quartier de la Gare Saint-Lazare ( Apollinaire était notamment un habitué de l’Austin’s, rue d’Amsterdam et du Critérion). En 1904, le poète travaille dans une banque (en fait, il y travaille depuis 1902 et quand elle ferme, il devient rédacteur en chef du Guide du rentier, avant d’entrer dans un autre établissement financier, la banque Châteaufort et Poitevin) et vit chez sa mère au Vézinet, c’est l’époque de sa rupture avec Annie Pleyden. On reste un peu sur sa faim si on espérait suivre le parcours d’Apollinaire, mais cela est dû au point de vue narratif choisi,  celui de Fernande Olivier, plus distante avec Apollinaire qu’elle ne l’a été, on le sent, du poète Max Jacob.

Le personnage le plus touchant de ces deux albums est d’ailleurs Max Jacob.  Amoureux inconditionnel et sans espoir du peintre Picasso, ami et soutien fidèle de Fernande dans les moments difficiles, il souffre avec  jalousie des amitiés successives de Picasso pour Apollinaire ou  Léo et Gertrude Stein et plus généralement de tous  ses amis masculins.  Fernande, on le sent bien, est la seule de ses amies qu’il apprécie réellement et sans que ne pointe un sentiment de  jalousie.   On découvre un Max Jacob aux multiples facettes, drôle et bouffon dans ses  imitations, poète sensible et novateur,  clown, toxicomane, homosexuel et cartomancien, il pratique les sciences occultes pour venir en aide à ses amis et réconcilier Pablo et Fernande. Apollinaire, présenté comme l’alter ego de Picasso confirme les recherches du peintre vers un art novateur et critique, pointant comme grand rival, Henri Matisse.  A la fin du second album, Picasso fait la connaissance des collecteurs américains, les Stein.  Fasciné par la personnalité de Gertrude, il entreprend son portrait et les séances de pose se muent en longues discussions sur l’art : Pablo Ruiz est en voie de devenir Picasso …
Bien documenté et s’appuyant sur un scénario dynamique cet album comme le précédent est passionnant, seulement un peu frustrant pour ne pas en donner plus à lire au lecteur curieux  en un seul album ( 84 pages…tout de même).  Mais quand le choix est de fixer l’ambiance d’une vie au  quotidien, avec ses anecdotes et ses petites choses de l’intime (ce en quoi il réussit parfaitement), il est impossible d’avancer à grandes enjambées et même de tout dire… Un franc bravo ! 
Blog de Clément Oubrerie, pour y retrouver son actualité et ses autres publications :
http://www.oubrerie.net/
Et puis, un message que j'avais publié en janvier 2012, à la sortie du T.1: ici
Double page de dessins de Pablo Picasso, portraits d'Apollinaire.   Album Pléiade "Apollinaire" p. 96 - 97 (Merci à M. - alias Pretty dark curls - pour le prêt de ces documents )